la bibliothêque

fonds ancien

Le 4 Mars 1891, la bibliothèque municipale d’Aire-sur-la-Lys s’installait dans le local qui est encore le sien à l’heure actuelle, au rez-de-chaussée de l’aile droite du bel Hôtel de Ville, édifice construit au XVIIIe siècle, classé Monument Historique en septembre 1947. La salle de lecture aux proportions harmonieuses est alors décorée de hautes boiseries de chêne destinées à recevoir les collections patrimoniales rangées selon un classement systématique et par format. Cette présentation fait aujourd’hui l’originalité de la Bibliothèque, gardienne des trésors patrimoniaux. Les reliures à dentelles ou armoriées côtoient ainsi les reliures aux petits fers du XVIIIe siècle et les reliures romantiques du XIXe.

 

Ouverte au public en 1839, la « bibliothèque publique » fut instituée par délibération municipale en date du 14 novembre 1838, conseil dirigé par le maire, Hippolyte Mahieu-Milon. A cette date son premier fonds est constitué de 331 volumes aux armes de la ville, rescapés de la Révolution. Il couvre quelques domaines du savoir : 19 volumes de dictionnaires de langues, 138 de jurisprudence et de droit, 43 de sciences et littérature, 117 d’histoire et 14 de gazettes. Une commission municipale est désignée. Elle comprend Martin, Louis Deslions, Froissart, principal du collège et Dumoutier, médecin.

La Bibliothèque est installée dans les magasins adjacents au bureau du maire. De décembre 1847 à mai 1848, la bibliothèque est dirigée par Charles Menche-Jeannet. Lui est adjoint, Bucquet qui lui succède en 1848. Une politique d’acquisition cohérente est menée, elle ne laisse échapper aucun des grands thèmes de l’édition française.

 

La Bibliothèque est cependant fermée à la fin de l’année 1850. Elle rouvre le 1er juillet 1851 avec une administration nouvelle. Après être restée quelque temps dans un local situé près du couvent des clarisses Anglaises avec accès par la grand’porte la bibliothèque est envoyée en 1858 dans les combles de l’Hôtel de Ville. Le 7 novembre 1890, le maire et son conseil donne un nouvel élan à l’établissement. Ils décident de transférer la Bibliothèque au rez-de-chaussée de l’Hôtel de Ville. Le maire, André Faucquette, écrit alors au ministre :
« Notre bibliothèque ouvre trois fois par semaine de 2 à 5 heures. On a fait relier tous les volumes, réparer ceux qui étaient endommagés. » L’inventaire réalisé en 1900 recensa 10 434 volumes. Le dernier récolement effectué dans les années 1990 mentionna 18 000 volumes imprimés.

Retenons de ces collections variées, où chaque domaine de la connaissance est représenté par de beaux ouvrages, le fonds « belles lettres » riche en traductions et éditions anciennes de grands auteurs des littératures nationales et étrangères, le fonds « Sciences et Arts » qui réunit des ouvrages qui vont de la philosophie à la musique en passant par les techniques et les sciences.

 

Celles-ci sont représentées par une belle édition de l’histoire naturelle de Buffon publiée en 1802. Les collections d’Histoire (Histoire de l’Antiquité, Histoire de France, Histoire des Pays étrangers) contiennent un nombre important de mémoires et de récits faits par les témoins des événements.

 

D’autres fonds plus modestes par leur nombre : la théologie, les Beaux-Arts, le Théâtre, n’en sont pas moins intéressants par la qualité des pièces qu’ils renferment.

 

Outre ses manuscrits (87 numéros), la bibliothèque rassemble à l’heure actuelle un fonds patrimonial réunissant près de 18 000 ouvrages (livres imprimés rares ou précieux du XVIe au XIXe siècle) 735 volumes pour le fonds local, 307 périodiques auxquelles s’ajoutent des collections iconographiques plans, cartes, esquisses, planches (400 pièces).

La bibliothèque est aussi dépositaire des archives municipales de l’ancien Régime dont la première charte date de 1188. Très bien conservées, elles permettent de suivre l’évolution de la ville jusqu’à la Révolution. On peut relever parmi les grandes séries, les actes constitutifs et politiques de la commune, notamment des chartes depuis 1188, les registres de délibérations de l’échevinage depuis 1739 à l an IV, les registres des offices municipaux de 1724 à l’an VII, les comptes de l’argentier de 1483 à 1789, les registres de correspondance du magistrat à partir de 1796. Un répertoire numérique est désormais à la disposition des lecteurs.

 

Aux côtés de la mémoire Airoise soigneusement conservée dans les textes, se côtoient diverses collections qui sont les témoins de l’Histoire intellectuelle de la ville.

L’échevinage (qui était le conseil municipal sous l’ancien régime) possédait des livres qui, par leur appartenance même à la communauté restèrent propriété de la collectivité. Citons notamment « l’encyclopédie ou dictionnaire raisonné » composé de 33 volumes dont 4 de planches » publié par Diderot et d’Alembert au XVIIIe siècle, « Les Œuvres de Maître Rabelais » (1711), « Les Lettres de Rousseau » sur différents sujets de Littérature publiées par Louis Racine (1750) et « Les Œuvres du Comte de Buffon » publiées en 1774.

Au XVIIIe siècle, de nombreux avocats et hommes de loi vivaient à Aire. Ils y ont laissé des ouvrages de jurisprudence et de théologie. Par exemple la bibliothèque possède le Commentaire Littéral sur tous les Livres de l’Ancien et du Nouveau Testament (1712) par le R.P Dom Augustin Calmet, bénédictin de la congrégation de Saint-Vanne et Saint-Hydulphe et l’Histoire du Vieux et du Nouveau Testament (1687) par le Sieur de Sombreval. En matière juridique, on trouve le Code Pénal, ou Recueil des principales ordonnances, édits et déclarations sur les crimes et délits (1752), le code militaire ou compilation des règlements et ordonnances de Louis XIV, roy de France et de Navarre (1709), les lois militaires recueillies du droit Romain (1672), Le Droit public de l’Europe fondé sur les traités (1748).

 

Le fonds patrimonial s’est enrichi au fur et à mesure des acquisitions, souscriptions, dons d’érudits ou de notables locaux, dépôts d’état.

 

La bibliothèque conserve quelques écrits provenant du château de Roquetoire que le marquis de Lugy avait fait construire dans les premières années du XVIIIe siècle sur un domaine acquis de la couronne d’Espagne.

 

Le second empire a offert à la bibliothèque airoise la collection des auteurs Latins et Grecs, les œuvres complètes historiques de Chateaubriand éditées en 1840 par Firmin Didot et les Œuvres Poétiques de Boileau éditées en 1824 par Froment. Des collections sont à signaler par leur originalité, en particulier la Biographie universelle de F.X Feller (édition de 1841), Le Grand Dictionnaire de Pierre Larousse, La Grande géographie Bond illustrée publiée sous la direction d’Onésime Reclus.

Le fonds local, sans cesse enrichi et complété par des achats, rassemble des imprimés (livres, fascicules, feuillets), mais également des manuscrits provenant de généreux donateurs. L’Abbé Denuncq, ancien religieux de Clairmarais a écrit seize volumes, tous relatifs à l’Histoire d’Artois. On peut signaler les « Coustumes générales de la Châtellenie et bailliage d’Aire, membre de la Comté d’Artois ». (XVIIe siècle, Ms.2) le recueil « Coustumes de la ville et banlieue de Saint-Omer, ensemble celle de la pruvosté de Monstroeul » appartenant à Mathieu Van Der Woestyne, de Saint-Omer (Ms.3, 1598), et le « logica Jesuitarum » ou cahier de philosophie du collège des Jésuites d’Aire, avec un portrait gravé d’Homère (Ms 7, XVIIe siècle).

L’apport des collections privées relatives à l’histoire de la cité constituent un gisement particulièrement intéressant. Le Baron André Joseph Camille Dard, bibliophile passionné, archéologue érudit, maire d’Aire-sur-la-Lys en 1883, 1884, 1888, possédait une bibliothèque considérable de plus de 3000 volumes et un grand nombre de plans, manuscrits et pièces diverses. La plupart des ouvrages concernaient l’Artois et la région d’Aire. La bibliothèque fut vendue aux enchères publiques, à Saint-Omer en novembre 1893. La ville a acquis une trentaine de titres et 5 manuscrits dont l’analyse des registres capitulaires, recueil de documents concernant le chapitre de Saint-Pierre d’Aire de 1433 à 1775, la Relation du siège de 1710 et l’atlas du canton d’Aire en 1772.

 

En ce qui concerne les journaux, la bibliothèque conserve des collections complètes : La Revue européenne, Le Charivari, l’Athenaeum Français, le Rénovateur, le Journal des Dames et des Modes, l’Apollon, etc, du XIXe siècle. Sur le plan local signalons la collection quasi complète de L’écho de La Lys, précieux instrument qui permet d’accéder à une meilleure connaissance de la ville et de sa région.

La bibliothèque conserve également des registres paroissiaux et d’état-civil d’Aire pour la période qui s’étend de 1589 à 1934.

 

De nombreux érudits locaux ont tenu à faire don de leurs œuvres ou notes rassemblées au cours de leurs travaux. Signalons le grand voyageur et conférencier Gabriel De Beugny d’Hagerue (1831-1922), auteur du Roman d’un Jésuite (1882) et du Secret de Rose et qui a publié de nombreux textes tels Les mémoires d’un commis-voyageur, mais aussi Récits Andalous à partir d’événements survenus en Andalousie entre 1796 et 1845. Signalons également les œuvres d’Eugène De Sars (1838 - 1909), poète et musicien, auteur notamment d’Au Gré des Vents (1886), et de Lucien Baudens (1804 - 1857), célèbre chirurgien militaire, membre du conseil de Santé en 1853, qui a dédicacé à la bibliothèque sa Relation de l’expédition de Constantine (1838).

Le fonds ancien de la bibliothèque offre donc de vastes ressources aux chercheurs, étudiants, lecteurs, qui trouvent sur place des ouvrages de référence et de précieuses éditions.

 

Si le développement de la lecture publique à Aire est aujourd’hui la mission essentielle de la Bibliothèque Municipale, la conservation, la mise en valeur et l’enrichissement du fonds patrimonial ne sont pas négligés.

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