la cité

Blanc ou noir, le Widdebrouck

Ce hameau couvre 446 ha et se trouve partagé entre " Blanc Widdebrouck " et " noir Widdebrouck ". Le blanc est au sud, le noir au nord. Ces dénominations n'ont rien à voir avec le jour et la nuit, il s'agit de la couleur de la terre, limoneuse dans la zone baignée par les eaux. Comme le nom l'indique, " Wijt " signifie large et " brock " marais, c'est une région gorgée d'eau où le travail de l'homme a conquis la terre sur le marécage. La richesse du sol et la présence de la Lys ont fait la fortune du hameau. On appelait autrefois marais les terres maraîchères. C'est aussi un endroit idéal pour cultiver et rouir le lin. Tout s'y trouve, la terre riche et l'eau abondante.

Le Widdebrouck fait partie du terroir d'Aire depuis les temps les plus anciens, mais, il a toujours eu un statut original. Bien qu'intégré dans la banlieue d'Aire, il possède au XIIIe siècle, son propre mayeur et ses échevins, et au XVe siècle, un bailli. Il en résulte des conflits de juridiction et des sources de " somptueux procès " avec l'échevinage d'Aire. Nos ancêtres étaient habitués à cette complexité.

De plus, le Widdebrouck ne dépendait pas du bailliage d'Aire, mais du bailliage de Cassel où la coutume est souvent différente. On peut signaler aussi par exemple que Boeseghem relevait de l'abbaye Saint-Pierre de Gand et que Cappelbrouck relevait du chapitre de Saint-Pierre d'Aire…

Alors qu'on a toujours parlé picard ou français à Aire, les habitants du Widdebrouck parlaient flamand…, comme dans les villages situés au nord de la Lys, Boeseghem et Steinkerque, les plus proches.

Nus sommes dans ce que l'on appelait la " tête de Flandres ", dénomination bien exacte. On retrouve au sud d'Anvers cette même dénomination.

Mais le Widdebrouck n'est pas une paroisse, il n'y a pas d'église, seulement une bien modeste chapelle, il dépendait de la paroisse de Saint-Martin où le latin puis le français étaient la langue des registres de chrétienté.

Les habitants du Widdebrouck étaient baptisés et mariés en français et vivaient en flamand.

En bordure du Neuffossé, ligne de défense très ancienne avant de devenir canal pour la navigation au XVIIIe siècle, le Widdebrouck se trouve en première ligne, lorsque l'ennemi assiège Aire.

L'année 1641 fut la plus effroyable que connurent les populations d'Aire, de ses hameaux et des villages des environs. Les assiégeants faisaient systématiquement la terre brûlée autour des fortifications d'Aire. En 1641, on se battit toute l'année. Les armées du roi de France s'emparèrent d'Aire après un long siège, mais les Espagnols reprirent la ville après un plus long siège. Tout le plat pays se trouva ravagé, dépeuplé, revenu à l'état sauvage et ce pendant plusieurs années.

Le roi d'Espagne, Philippe IV, décida la construction d'un fort destiné à protéger Aire, en lisière du domaine de la tête de Flandres, a proximité de la jonction du Neuffossé et de la Lys. C'est le fort Saint-François construit en 1642, dont le nom est devenu fort Gassion en 1887.

Cette fortification s'avéra inutile. On le vit bien en 1676 et en 1710, il ne joua aucun rôle dans la conduite des sièges. Vauban l'avait intégré dans le système de défense de la ville, en pure perte. Il a été déclassé en 1924 et vendu.

 

Aujourd'hui les chevaux qui s'ébattent dans les pâtures autour des rares bâtiments subsistants du fort animent un paysage de vertes prairies de saules argentés que reflète la calme miroir des eaux de la Lys.

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